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Jeune Afrique

A l’issue d’une procédure d’une durée inacceptable (14 ans, Alexandre BRAUN a assuré la défense d’un militant politique congolais qui avait violenté un haut dignitaire de passage en France.

Le parcours du prévenu, fait de torture, d’enfermement et d’exil, expliquait était déterminant dans son passage à l’acte.

Ironie de l’histoire : le client de Maître BRAUN, opposant au moment des faits, était devenu fonctionnaire au moment du procès.

Jeune Afrique, sous la plume de Romain Chanson s’est fait l’écho de ce dossier. La version complète de l’article est accessible à l’adresse https://www.jeuneafrique.com/1675497/societe/a-paris-le-proces-du-guet-apens-contre-leon-kengo-wa-dondo-ancien-president-du-senat-de-rdc/

En voici quelques extraits :

À Paris, le procès du guet-apens contre Léon Kengo wa Dondo, ancien président du Sénat de RDC

Le 31 décembre 2011, Léon Kengo wa Dondo était agressé par des militants congolais devant la gare du Nord à Paris. Leur procès se tenait à Paris, du 2 au 3 avril, et la politique congolaise s’est invitée, pour l’occasion, dans la salle d’audience.

Il devait passer le réveillon au très chic hôtel Bristol à Paris, il le passera dans le service de réanimation à l’hôpital Fondation Rothschild. Léon Kengo wa Dondo, président du Sénat de RDC au moment des faits et candidat déçu à l’élection présidentielle de novembre 2011, a été violemment agressé à Paris, le 31 décembre de cette année-là, par des militants de la diaspora. Surnommés les « combattants », certains lui reprochaient d’avoir participé au dîner d’investiture du président Joseph Kabila. La photo d’une poignée de main avec le Raïs avait enragé les militants.

45 secondes d’agression

P, c’est un surnom, fait partie des militants qui rejoignent la gare. « L’objectif, c’était de lui parler des assassinats et des crimes au pays », avance-t-il à la barre. Léon Kengo wa Dondo fait mine de les ignorer, selon P. ce qui le met en colère. Ce grand gaillard vise les chevilles de l’homme de 76 ans, le renverse puis le frappe d’un coup de pied au visage. Léon Kengo wa Dondo perd connaissance. Il est exfiltré par son garde du corps vers la berline qui l’attendait. Sa chemise est tachée. « C’est le sang que verse le Congo », commente un homme qui filme l’agression – la vidéo sera mise en ligne. La voiture s’extrait de la foule en colère et disparaît. L’agression a duré 45 secondes.

En mauvais état, la victime est admise sous un nom d’emprunt à l’hôpital Fondation Rothschild pour y être opéré au cerveau pour un hématome sous-dural. Il subira une nouvelle opération quelques jours plus tard. Son agression lui vaut 10 jours d’incapacité totale de travail (ITT), dont cinq jours en réanimation. À l’époque, « l’épouse et le fils se demandent s’il va survivre », appuie Étienne Arnaud, l’un des deux avocats de la partie civile devant le tribunal de Paris.

P . , physique de costaud mais voix timide, réfute l’idée d’un projet d’assassinat. Il se dit étranger aux messages dont la justice a eu connaissance après des écoutes téléphoniques. « Il fallait tuer Kengo pour l’histoire », commente une certaine M.L

Me Braun a tenté, comme ses confrères, de faire entendre la dimension politique de l’agression. « C’est un dossier de violence, mais c’est aussi un dossier politique, ça ne le sublime pas, mais vous ne pouvez pas l’ignorer », a-t-il lancé tandis que la procureure appelait à ne pas réduire l’agression à une action contre le régime congolais. « Ce dossier, c’est l’arrivée à la gare du Nord, pendant 2 minutes, du conflit congolais », a défendu l’avocat.

Il a rappelé le pedigree de Léon Kengo wa Dondo, « le Talleyrand congolais », selon l’expression du Canard enchaîné. Il a traversé tous les régimes et aurait donc accepté toutes les compromissions. Me Pierre Darkanian, avocat d’un autre des accusés, a également tenté d’écorner l’image du « gentil M. Kengo ». Il l’a décrit comme cumulant les propriétés dans le monde entier tandis que les Congolais mourraient de faim. « Avant d’être ce vieillard, c’est aussi un sénateur qui touche 250 000 dollars par an. Il est assez légitime que l’opposition congolaise puisse être intéressée par sa venue », a-t-il justifié.

Son client, Bongenge Sali, affirme pourtant qu’il est resté chez lui ce jour-là. « J’avais autre chose en tête, on préparait la fête du nouvel an ». Problème : il a été dénoncé par un courrier anonyme du 10 janvier 2022, signé d’un membre du mouvement qu’il préside, les Résistants combattants du Kongo (RCK).

Tout ce petit monde, qui faisait le coup de poing en 2011, a tourné la page. Les résistants d’hier s’accommodent de Félix Tshisekedi qu’ils ont côtoyé quand il n’était pas le chef de l’État, mais un opposant en exil en Belgique.

« Vous prendrez en compte sa réinsertion, qui est exceptionnelle. Vous avez le militant, opposant politique en 2011, et qui est en 2025 un haut fonctionnaire au Congo », avait tenté Me Braun. Las, les juges ont condamné son client à deux ans de prison avec sursis simple (sans détention s’il ne commet pas d’infraction dans un délai de 5 ans), en adéquation avec la réquisition. Il est reconnu coupable de tous les chefs d’accusation avec préméditation, comme l’ensemble des prévenus.

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